Combien de vieillards donnent de bons conseils, pour n’être plus en âge de donner de mauvais exemples ? « Croyez-en, disent-ils, ma vieille expérience »… Tu parles ! Comme s’il suffisait d’être vieux pour être sage… Expérience, c’est en général le nom que l’on donne au dégoût des passions qu’on regrette de ne plus éprouver.
Monthly Archives: janvier 2016
Géométrie du cœur
« J’ai pris grand soin de ne pas tourner en dérision les actions humaines, de ne pas les déplorer, de ne pas les maudire mais de les comprendre. » (Traité politique, Spinoza)
Comment apprendre ? (Platon – « Ménon »)
Il est des dialogues de Platon qui n’offrent, en un sens, aucune aspérité, tant ils ressemblent à ce qu’ils doivent être. Le Ménon est de ceux-là. Plus que le Banquet, plus que le Gorgias, plus même que le Phèdre. Quand on pense Platon, on pense Ménon, comme on pense labrador ou berger allemand quand on pense chien.
Faut-il servir ses compatriotes à sa guise, ou bien les gouverner à la leur ? (« Coriolan » – Shakespeare, II)
Homme libre, toujours tu chériras ta mère… Tel pourrait être l’adage en sous-titre de Coriolan, le général romain que seule la piété filiale est susceptible de mettre à genoux. Digne fils de Volumnie, Coriolan le brave doit d’abord son courage au fait de savoir que la grandeur est aussi de pouvoir s’incliner.
Réflexions sur la question juive – Sartre
L’antisémitisme compose, pour la philosophie, un merveilleux objet d’étude, simultanément complexe et transparent. Peu de maladies ont le bon goût d’apparaître autant, et d’offrir à ce point leurs symptômes au scalpel du penseur. De sorte que, paradoxalement, travailler sur l’antisémitisme, c’est un plaisir.
A quelles conditions la prudence est-elle un courage ?
Si l’histoire était une science exacte, agir serait inutile. Si l’esprit gouvernait le corps, il suffirait de connaître le solfège pour devenir Mozart. Si l’avenir était une science exacte, la prudence serait une superstition. Seulement voilà, c’est ici-bas que vous vivons, dans un monde mêlé de matières et soumis au hasard.
La plus perdue de toutes les journées est celle où l’on n’a pas ri (« Maximes et Pensées » – Chamfort)
Romancier sans roman, révolutionnaire sans avenir, moraliste sans cynisme et Adonis devenu laid, Sébastien-Roch Nicolas de Chamfort a parfaitement réussi chacun de ses échecs. De lui ne reste que les discours des autres, quelques mauvaises pièces et un recueil de maximes dont le génie n’estompe jamais l’amertume et dont la délicatesse n’épuise pas l’ampleur.
« Le Rivage des Syrtes » – Julien Gracq
Que se passe-t-il quand il n’arrive rien ? Tout, ou presque tout. Tout ou presque, en tout cas, de ce qui arrive à notre insu quand, pris par la vie, encombré des soucis qui disparaissent à l’aube, on oublie, tout simplement, d’accorder son attention à ce qui le mérite vraiment…
« La Peau de chagrin », Richesse des morts en sursis
« Il voyait la MORT. Ce banquier splendide entouré de courtisanes fanées, de visages rassasiés, cette agonie de la joie, était une vivante image de sa vie. Raphaël regarda trois fois le talisman qui se jouait à l’aise dans les impitoyables lignes imprimées sur la serviette : il essayait de douter, mais un clair pressentiment anéantissait son incrédulité. Le monde lui appartenait, il pouvait tout et ne voulait plus rien. » (La Peau de chagrin)
« Bérénice » – Racine
Les histoires d’amour finissent mal, surtout quand personne ne meurt à la fin et qu’il faut continuer à vivre, quoiqu’on s’aime en vain. « Ah, Rome ! Ah, Bérénice ! Ah, prince malheureux ! Pourquoi suis-je empereur ? Pourquoi suis-je amoureux ? »